C’est devant plus de cinquante personnes ayant bravé la pluie le vent et le froid – certains venus de loin- que la séance commence ce samedi 27 février 2016 à 14 h 30, dans le cadre prestigieux de l’auditorium de la chapelle des Jésuites de Carcassonne.
La présidente de l’AEC, Annie LAMBERT, salue Madame BARDOU, maire adjointe chargée des associations, qui nous rend une courte visite, et Monsieur BES, maire adjoint chargé de la Culture. L’Association les remercie de la mise à disposition par la ville de l’auditorium pour les conférences de l’AEC. La présidente présente ensuite la conférencière Monique DOLLIN du FRESNEL, que certains avaient déjà eu le plaisir d’entendre en ce même lieu pour la présentation de son livre sur Pierre-Paul Riquet, créateur du canal du Midi. Puis elle cède la parole à Madame DOLLIN du FRESNEL.

Monique Dollin du Fresnel
En introduction la conférencière commence par citer les dernières paroles sur le bûcher du grand maître des Templiers, Jacques de Molay. Les paroles imaginées par le romancier Maurice Druon, et celles rapportées par les chroniques. Elle explique ce qui l’a motivée dans sa recherche sur Clément V sur lequel elle a publié un livre. Ce pape est pour elle un oncle à la 23e génération.
Elle poursuit en présentant les protagonistes de l’affaire des Templiers :
- Le roi Philippe le Bel, à court d’argent notamment à cause de la guerre de Flandres et qui recourt à cet effet à divers expédients : manipulations monétaires ; confiscation des biens des juifs et des banquiers lombards et enfin tentative de main mise sur les biens templiers.
- L’ordre du Temple : l’un des ordres fondés au XIIe siècle pour protéger la Terre-Sainte et soutenir les pèlerins, riche grâce aux dons des fidèles et au rôle de banquier des Templiers; devenu un peu inutile depuis la chute de Saint-Jean d’Acre en 1291.
- Bertrand de Got, gascon ayant fait des études de droit à Orléans et Bologne, études qui lui ont permis de faire carrière dans l’Église et qui lui vaudront d’être élu pape sous le nom de Clément V. La conférencière montre la volonté du pape d’échapper à la fois à l’influence du roi de France et aux querelles italiennes d’où son choix de se faire couronner à Lyon (ville à la frontière de la France et de l’Empire), puis son installation provisoire à Bordeaux (ville anglaise) et à Poitiers et enfin son installation définitive à Avignon (terre pontificale.)

A l’écran, Guillaume de Nogaret, petite fils d’un cathare audois et âme de la machination contre les Templiers
Monique DOLLIN du FRESNEL rappelle la machination menée par Guillaume de Nogaret, petit-fils d’un cathare audois et légiste de Philippe le Bel, dans l’arrestation des Templiers du royaume de France, les tortures pratiquées à leur encontre, l’exécution de certains d’entre eux ayant avoué ou étant revenus sur leurs aveux (relaps). Elle montre aussi que, contrairement aux idées reçues, le pape n’a pas été un valet servile du roi dans cette affaire. Elle présente en particulier un document retrouvé depuis peu et qu’elle a consulté aux Archives secrètes du Vatican, relatant l’entrevue d’envoyés du pape avec le grand-maitre du Temple Jacques de Molay et ses compagnons, détenus au château de Chinon, et établissant l’innocence des Templiers.

Montrant une reconstitution de l’enclos du Temple à Paris, la conférencière rappelle que le roi s’était réfugié là sous la protection des templiers, pour échapper à une émeute de parisiens ruinés par l’inflation. Le roi ne se montrera pas pour autant reconnaissant envers l’ordre.
Elle rappelle ensuite que le concile de Vienne convoqué en 1311 par Clément V pour régler le sort de l’ordre du Temple ne condamne pas les Templiers, mais dissous l’ordre. Ce concile décide également de confier les biens des Templiers aux Hospitaliers, privant Philippe le Bel de leur trésor, bien qu’il semble en avoir bien profité entre 1307 et 1312.
Elle conclut en évoquant le cancer de Clément V qui l’a affaibli et qui a conduit le pontife à temporiser avec le roi plutôt que de l’affronter frontalement. Puis elle cède la parole au public.

Un public attentif et passionné, qui a particulièrement apprécié les anecdotes rapportées, souvent avec humour, par la conférencière. Et notamment le drame s’étant produit lors du couronnement du pape à Lyon. Au premier plan : plusieurs membres de notre Conseil d’administration.
A noter dans les questions et interventions du public qu’Annie LACOMBE, s’appuyant sur les travaux de Robert VINAS, n’a pas la même perception que Monique DOLLIN du FRESNEL sur les rapports entre Clément V et Philippe le Bel. Une confrontation de ces deux chercheurs est envisagée et souhaitée.
Sur une question concernant le port de la barbe par les Templiers, Gauthier LANGLOIS intervient pour rappeler qu’on est prisonnier des représentations établies au XIXe siècle, alors que les représentations médiévales les montrent sans barbe. En revanche l’iconographie médiévale peut obéir à des conventions qui font que l’on représente souvent les personnages importants (sages, vieux, Charlemagne) avec une barbe sans que cela corresponde à une réalité.
Gauthier LANGLOIS évoquant la personnalité du franciscain Bernard Délicieux, lecteur du couvent de Carcassonne, demande à la conférencière de préciser ses rapports avec Clément V. Monique DOLLIN du FRESNEL rappelle que ce moine a servi de modèle pour le personnage de Guillaume de Baskerville dans le roman d’Umberto Ecco et confirme la bienveillance du pape envers ce religieux.
La conférence se termine par des dédicaces de la biographie de Clément V, puis par le traditionnel pot concluant nos séances.